LA BISCUITERIE ARTISANALE S’OFFRE UNE NOUVELLE JEUNESSE

Longtemps associée aux souvenirs d’enfance et aux goûters familiaux, la biscuiterie artisanale vit aujourd’hui un véritable renouveau. En France, la consommation annuelle de biscuits avoisine les 5 kilos par habitant, selon les chiffres du Syndicat des Biscuits, Gâteaux et Panification. Si la grande distribution continue de dominer un marché estimé à près de 2,5 milliards d’euros, les biscuiteries artisanales et bio séduisent de plus en plus de consommateurs. Leur ancrage local, leurs démarches responsables et leur créativité constituent des arguments décisifs, notamment dans le Sud de la France, où le lien au terroir reste fort.

Depuis quelques années, de nombreuses petites fabriques émergent en misant sur les ingrédients naturels, les circuits courts et les recettes sans additifs. Un mouvement qui s’inscrit dans la tendance générale de la consommation alimentaire : selon l’Observatoire Cetelem, plus d’un Français sur deux déclare privilégier les produits artisanaux et locaux, même si cela implique de payer un peu plus cher.

C’est dans ce contexte qu’est née en 2022 la Maison Craquelin, à La Ciotat (Bouches-du-Rhône). À sa tête, deux amis d’enfance, David et Nicolas, désireux de recréer les saveurs de leur jeunesse dans la cuisine familiale.

« Nous avions envie de retrouver les biscuits de nos grands-mères, les odeurs, l’émotion du fait maison », raconte Nicolas Gimenez, cofondateur. « Nous avons donc créé notre biscuiterie artisanale en pensant à nos enfants et à l’art de vivre méditerranéen. »

Dans le Sud, l’artisanat joue un rôle moteur. Les biscuiteries privilégient le savoir-faire, l’authenticité et l’engagement environnemental. Certaines développent même des gammes 100 % bio, sans gluten ou végan, en partenariat avec des producteurs locaux : farine de châtaigne, agrumes ou herbes aromatiques.

À la Maison Craquelin, l’approvisionnement suit une logique de proximité. « Notre fleur de sel, notre sucre, la farine, le beurre, tout est français », insiste Nicolas Gimenez. « Le romarin que nous utilisons vient d’une herboristerie à quelques kilomètres de chez nous. L’objectif est aussi de proposer des recettes originales. Nous en avons 22, dont 13 sucrées et 9 salées. Tout est fabriqué à la main dans notre atelier, sans sous-traitance, et sans colorant ni additif. »

Cet ancrage territorial répond aux attentes des consommateurs, de plus en plus sensibles à la traçabilité et à la durabilité. L’emballage devient lui aussi un vecteur d’image : recyclable, localement produit, jusqu’aux étiquettes fabriquées au pied de la montagne Sainte-Victoire, pour la Maison Craquelin. Une démarche qui permet de se différencier des grands industriels et de fidéliser une clientèle prête à payer un peu plus ses petits biscuits.

Car le positionnement de ces biscuiteries est assumé : « Nous avons choisi le haut de gamme. Nos biscuits sont 30 à 40 % plus chers, mais nos clients savent qu’ils repartent avec un produit exceptionnel, bon et beau, comme une bonne bouteille de vin », explique Nicolas Gimenez. « Notre clientèle se compose d’épiceries fines, d’hôtels haut de gamme mais aussi de particuliers en quête d’un achat plaisir. Il faut aussi se renouveler, inventer, tester, faire goûter : deux à trois nouvelles recettes sont créées chaque année, au rythme des saisons. »

En ouvrant leurs ateliers au public, certaines fabriques transforment la biscuiterie en expérience culturelle et touristique. » Cette transparence séduit, cette proximité avec le consommateur est essentielle « insiste Nicolas Gimenez.

Derrière ces initiatives, c’est toute une filière qui se réinvente. Dans un secteur dominé par des acteurs industriels, la montée en puissance des biscuiteries artisanales reflète une double aspiration : revenir à l’authenticité et participer à la transition alimentaire.

Dans le Sud, les biscuits ne sont plus de simples friandises : ils deviennent le symbole d’un art de vivre méditerranéen, entre terroir, convivialité et innovation.

« Finalement, le plus beau compliment, confie Nicolas Gimenez, c’est de dire qu’en croquant dans l’une de nos préparations, toutes les émotions de l’enfance refont surface. »

Nathalie Chevance